Les dipôles étudiés dans ce cours vérifient l'approximation des régimes quasi-permanents (ARQP).
I- Classification des dipôles :
On a vu dans le cours précédent qu'on peut distinguer deux types de dipôles : les récepteurs et les générateurs. Nous verrons dans ce paragraphe qu'il existe d'autres classifications qui permettent une meilleure compréhension et une analyse plus fine des circuits électriques.
1- Caractéristique d'un dipôle
a- Définition :
Définition
On appelle caractéristique courant-tension d'un dipôle, la courbe représentant l'intensité du courant qui le traverse en fonction de la tension à ses bornes.
On appelle caractéristique tension-courant d'un dipôle, la courbe représentant la tension à ses bornes en fonction de l'intensité du courant qui le traverse.
Remarques : La caractéristique tension-courant : l'intensité est en abscisses et la tension en ordonnées.
La caractéristique courant-tension : la tension est en abscisses et l'intensité en ordonnées.
Les deux caractéristiques tension-courant et courant-tension sont fonctions réciproques l'une de l'autre. Les courbes se déduisent alors l'une de l'autre par symétrie par rapport à la première bissectrice du repère.
b- Caractéristique statique et caractéristique dynamique
Définition
En régime continu, sont des constantes indépendantes du temps, et chaque valeur de impose une seule valeur de , l'ensemble de tous ces points constitue la caractéristique statique tension-courant.
En régime variable, sont des fonctions temporelles et le domaine de variation de impose celui de , l'ensemble de tous ces points constitue la caractéristique dynamique tension-courant.
Exemples : 1) Soit le dipôle tel que avec une constante, les caractéristiques statique et dynamique sont confondues en une droite passant par l'origine et de pente .
2) Le dipôle tel que avec des constantes.
La caractéristique dynamique est une ellipse centrée d'équation : .
c- Point de fonctionnement d'un dipôle
Définition
On appelle point de fonctionnement d'un dipôle tout point appartenant à la caractéristique statique du dipôle.
Une caractéristique statique d'un dipôle n'est autre que l'ensemble des points de fonctionnement der ce dernier.
Exemple : Appliquons une tension contante aux bornes du dipôle présenté dans le paragraphe précédent.
Le point est alors un point de fonctionnement de .
Remarque : Ne pas confondre les différents points de fonctionnement d'un dipôle avec LE point de fonctionnement d'un circuit, notion qu'on définira dans le cours suivant.
2- Dipôles symétriques ou polarisés
Définition
Si la caractéristique statique d'un dipôle est symétrique par rapport à l'origine, alors le dipôle est dit symétrique, ce qui veut dire que l'on peut permuter ses bornes de connexion.
Et si la caractéristique statique est dissymétrique par rapport à l'origine, alors le dipôle est dit polarisé ou non symétrique.
Exemple : Le dipôle présenté dans l'exemple du paragraphe précédent est un dipôle symétrique.
3- Dipôles actifs ou passifs
Définition
Les dipôles actifs sont les dipôles qui ont une caractéristique statique ne passant pas par l'origine.
Les dipôles passifs présentent une caractéristique statique qui passe par l'origine.
Si on note :
Alors le dipôle est :
Exemples :
Un dipôle passif est toujours récepteur, il est incapable de provoquer lui-même le passage d'un courant électrique.
Un dipôle actif, capable d'imposer le sens d'un courant, se comporte comme un générateur lorsqu'il transforme de l'énergie mécanique , chimique ou autre en énergie électrique qu'il fournit au circuit, et lors de l'opération inverse, il devient récepteur.
4- Dipôles linéaires
Définition
On dit qu'un dipôle est linéaire si la tension à ses bornes et l'intensité qui le traverse sont liées par une équation différentielle linéaire à coefficients constants de la forme :
Avec :
une fonction temporelle indépendante de et de
En régime statique, on a sont des constantes.
On obtient donc :
Résultat
La caractéristique statique d'un dipôle linéaire est toujours une droite
Remarque : Par contre, la caractéristique dynamique d'un dipôle linéaire n'est en général pas une droite.
II- Dipôles passifs linéaires fondamentaux
1- Conducteur ohmique ou résistor
a- Loi d'Ohm
Loi d'Ohm
Un conducteur ohmique , ou résistor est un dipôle qui vérifie la loi d'Ohm suivante :
est la tension aux bornes et est l'intensité du courant traversant le dipôle.
est appelé la résistance du conducteur ohmique, elle est positive et s'exprime en Ohm , et on a
On définit de même la conductance du conducteur ohmique, exprimée en Siemens [S] :
Un conducteur ohmique est schématisé en convention récepteur par :
Les caractéristiques tension-courant statique et dynamique sont confondues en une droite passant par l'origine, de pente , il s'agit d'un dipôle symétrique :
Remarque : Par abus de langage, on appelle un conducteur ohmique une résistance, c'est d'ailleurs l'appellation la plus courante.
b- Aspect énergétique : Effet Joule
Le passage d'un courant dans un résistor se manifeste par un échauffement du milieu conducteur. Ce phénomère, appelé effet Joule , s'interprète par les échanges énergétiques entre les électrons mobiles et les ions fixes du réseau, à la suite de collisisons.
La puissance électrique consommée par le résistor est :
c- Résistance d'un conducteur
La résistance ne dépend pas de l'état électrique du conducteur ohmique mais dépend de la nature de ce conducteur et de ses caractéristiques géométriques.
Dans le cas d'un conducteur cylindrique homogène, on montre que la résistance est proportionnelle à la longueur du conducteur et inversement proportionelle à la section de celui-ci :
La résistance d'un conducteur ohmique cylindrique de longueur et de section est :
Le coefficient de proportionnalité s'appelle la résistivité du milieu conducteur, elle s'exprime en
On présente la résistivité de quelques matériaux :
2- Condensateur idéal
a- Définition et fonctionnement
Définition
Un condensateur est l'association de deux conducteurs qui se font face, appelés armatures. Lorsqu'il est soumis à une tension non nulle, des charges opposées s'accumulent sur les deux armatures.
Cette charge est proportionnelle à la tension aux bornes du condensateur :
Le coefficient de proportionnalité, noté , s'appelle la capacité du condensateur, elle est exprimée en farad [F], et on a
On note l'importance du sens choisi pour l'intensité par rapport à la position des charges et : l'intensité arrive sur l'armature de charge . L'arrivée du courant sur une armature provoque une variation de la charge de l'armature et donc une variation sur l'autre pour assurer la conservation de la charge au niveau du composant. Un courant d'intensité partira donc de la seconde armature même si les charges ne traversent pas physiquement l'isolant.
L'intensité du courant correspondant au débit de charges est algébrique, elle est positive si la charge de l'armature "d'arrivée" augmente et négative si diminue.
On obtient la relation courant-tension d'un condensateur idéal (ou parfait) :
Un condensateur est schématisé en convention récepteur par :
Remarques : Les capacités des condensateurs usuels sont en général faibles, inférieures au microfarad :
L'étude théorique du condensateur sera effectuée dans le cours d'électromagnétisme.
b- Aspect énergétique
Rappel : Énergie électrique
L'énergie électrique est une fonction temporelle primitive de la puissance électrique :
Elle est exprimée en Joule [J], et on a
La puissance électrique instantanée reçue par un condensateur idéal a pour expression :
Soit :
représente l'énergie électrique emmagasinée dans le condensateur idéal. Cette énergie est fournie par une source extérieure et le bilan énergétique valable à tout instant exige la continuité de . Par conséquent :
La tension aux bornes d'un condensateur idéal, ainsi que sa charge , ne peuvent pas subir de discontinuité .
c- Régime continu
En régime continu :
Le condensateur idéal se comporte comme un coupe circuit (c'est-à-dire comme un interrupteur ouvert)
d- Exercice d'application
Exercice
Un condensateur idéal , de capacité , est soumis :
1) Soit à une tension continue : Préciser sa caractérisation statique tension-courant.
2) Soit à une tension sinusoïdale , de pulsation : Préciser sa caractéristique dynamique tension-courant.
Réponse :
1) Puisque la tension à laquelle le condensateur est soumis est continue, ie. , donc .
On en tire que la caractéristique statique tension-courant est confondue avec l'axe des abscisses.
En réalité, chaque condensateur est caractérisé par une tension maximale dite tension de claquage qu'on note .
Si cette tension est dépassée, , un courant s'établit à travers l'isolant qui sépare les deux armatures, provoquant une décharge électrique. Cette décharge est généralement destructrice et la destruction est souvent irréversible.
On en déduit que :
2) Soit . Alors
Or, .
Il s'ensuit alors que :
On conclut alors que :
Figure :
(on prend pour éviter le claquage du condensateur)
3- Bobine idéale
a- Définition et fonctionnement
Définition
Une bobine est constituée de spires obtenues par l'enroulement régulier d'un fil métallique conducteur.
La tension aux bornes d'une bobine est proportionnelle à la dérivée par rapport au temps de l'intensité du courant qui la traverse :
Le coefficient de proportionnalité, noté , s'appelle l'inductance de la bobine, elle est exprimée en henry [H] :
Un bobine est schématisé en convention récepteur par :
Remarque : L'étude théorique de la bobine sera effectuée dans le cours d'électromagnétisme.
b- Aspect énergétique
La puissance électrique instantanée reçue par une bobine idéale a pour expression :
Soit :
représente l'énergie magnétique emmagasinée dans la bobine idéale. Cette énergie est fournie par une source extérieure et le bilan énergétique valable à tout instant exige la continuité de . Par conséquent :
L'intensité du courant traversant une bobine idéale ne peut pas subir de discontinuité .
c- Régime continu
En régime continu :
La bobine idéale se comporte comme un court-circuit (c'est-à-dire comme un interrupteur fermé)
d- Exercice d'application
Exercice
Calculer l'énergie emmagasinée dans une bobine d'inductance parcourue par un courant continu d'intensité
.
Réponse :
On a directement :
Application numérique :
III- Dipôles actifs linéaires
Il est d'usage désormais d'adopter la convention générateur lors de l'étude d'un dipôle actif, puisqu'il peut se comporter comme un générateur ou comme un récepteur.
1- Source indépendante de tension
Définition
Une source indépendante de tension alimentant un circuit est un dipôle actif dont la tension entre ses bornes reste constante pour toute valeur de courant :
La constante est appelée la force électromotrice de la source de tension, elle est toujours positive.
Une source indépendante de tension est schématisée en convention générateur par :
Une source indépendante de tension est un générateur si elle impose le passage du courant, donc si .
Dans ce cas, elle fournit une puissance (en convention générateur).
Une source indépendante de tension est un récepteur si le passage du courant lui est imposé par le circuit, donc si .
Dans ce cas, elle reçoit une puissance (toujours en convention générateur).
On trace la caractéristique statique d'une source indépendante de tension :
2- Source indépendante de courant
Définition
Une source indépendante de courant est un dipôle actif délivrant un courant constant au circuit, quelle que soit la tension entre ses bornes :
La constante est appelée le courant électromoteur de la source de courant, il est toujours positif.
Une source indépendante de courant est schématisée en convention générateur par :
Une source indépendante de courant est un générateur si elle impose la tension entre ses bornes, donc si .
Dans ce cas, elle fournit une puissance (en convention générateur).
Une source indépendante de courant est un récepteur si la tension entre ses bornes lui est imposée par le circuit, donc si .
Dans ce cas, elle reçoit une puissance (toujours en convention générateur).
On trace la caractéristique statique d'une source indépendante de courant :
3- Modélisation d'un dipôle actif linéaire
a- Définition et fonctionnement
Définition
Un dipôle actif linéaire est un dipôle dont la caractéristique est modélisée par un segment de droite d'équation
Tel que est la tension entre ses bornes, est l'intensité de courant qui le traverse, et correspondent aux cas limites, c'est-à-dire :
La caractéristique statique d'un dipôle actif linéaire :
Modélisation :
En posant , on obtient respectivement une résistance dite résistance interne (en ) et une conductance dite conductance interne associée (en ). Ce qui permet de modéliser le dipôle actif linéaire :
Soit par un générateur de tension en série avec cette résistance interne, dit générateur de Thévenin .
Soit par un générateur de courant en parallèle avec cette conductance interne associée, dit générateur de Norton .
Le modèle de Thévenin et le modèle de Norton sont équivalents, et on passe de l'un à l'autre suivant la nature du circuit connecté par la relation suivante :
est la tension à vide en
est la résistance interne en
est le courant de court-circuit en
b- Aspect énergétique
Soient deux dipôles actifs linéaires définis respectivement par dans la représentation de Thévenin tel que , et on réalise le branchement suivant :
On a
Puisque , alors est générateur et est récepteur et , et dans le schéma, est en convention générateur tandis que est en convention récepteur.
La puissance électrique fournie par le dipôle actif linéaire est :
où est l'intensité du courant traversant le dipôle et la tension à ses bornes en convention générateur.
Le terme représente la puissance fournie par le générateur idéal de tension de .
Le terme représente la puissance dissipée par effet Joule dans la résistance interne de .
Remarque : La puissance électrique fournie par la résistance interne est négative . Elle correspond à la puissance électrique reçue (dissipée) positive , en effet, la résistance interne à un caractère récepteur, donc la puissance qu'elle reçoit, calculée en convention générateur, est négative.
La puissance électrique reçue par un dipôle actif linéaire est :
où est l'intensité du courant traversant le dipôle et la tension à ses bornes en convention récepteur.
Le terme représente la puissance utile du récepteur, c'est-à-dire la fraction de la puissance électrique reçue par le récepteur pouvant être convertie en une forme d'énergie non thermique.
Le terme représente la puissance dissipée par effet Joule dans la résistance interne.
Remarque : La puissance électrique reçue par la résistance interne est positive . En effet, la résistance interne à un caractère récepteur, donc la puissance qu'elle reçoit, calculée en convention récepteur, est positive.
IV- Exemples de dipôles non linéaires
1- Électrolyseur
Définition
Un électrolyseur est un récepteur qui comporte deux électrodes de même nature immergées dans un électrolyte.
Un électrolyseur est symbolisé par :
Si l'on impose le passage d'un courant dans un électrolyseur, des réactions chimiques aux électrodes se produisent. Il y a création d'une force contre électromotrice de polarisation notée . Le courant ne peut circuler que si , comme le montre le caractéristique suivant :
2- Diode à jonction idéale
Définition
Une diode à jontion est une association de deux semi-conducteurs de dopage différent, elle se comporte comme :
Un coupe-circuit en fonctionnement inverse, ou sens est bloquant, c'est-à-dire lorsque
Un court-circuit en fonctionnement direct ou sens passant, et dans ce cas, on a
Une diode à jonction idéale est schématisée en convention récepteur par :
La caractéristique statique tension-courant d'une diode à jonction idéale :
Publié par malou/Panter
le
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